Les archives de Perville font leur révolution
Bien qu'au cœur de Perville se trouve une rue modestement intitulée "Tout-y-Manque", ce n'est clairement pas le cas dans les archives communales. C’est le constat qu’a pu faire le Service Assistance à l’Archivage lors de son intervention sur place entre juillet et septembre 2024. Fait assez rare pour être souligné, les archives de la période moderne (1790-1982) représentent à Perville un volume plus important que les archives contemporaines (1983 à aujourd’hui), reflétant l’attention particulière accordée par les générations successives d’édiles à la préservation du patrimoine écrit de la commune.
Ainsi, après avoir pris en charge 18 mètres linéaires de documents, le Service Assistance à l’Archivage a proposé à l’élimination seulement 4,5 mètres linéaires d’archives dépourvus de toute utilité administrative, juridique ou historique. Le volume actuel conservé est d’environ 14 ml de documents dont 9 ml d’archives modernes. Le traitement des archives communales a été complété par la création d’inventaires détaillés et d’outils de gestion adaptés, désormais à la disposition de la mairie pour simplifier le travail de l’administration municipale.
Calendrier républicain : le casse-tête révolutionnaire
La mairie de Perville a la particularité de conserver un fonds historique particulièrement riche, notamment datant de la période Révolutionnaire. Plusieurs documents retrouvés témoignent du bouleversement qu’a été la Révolution Française, y compris pour une commune rurale comme Perville, si éloignée de la capitale. On peut citer par exemple une déclaration du prêtre de la paroisse, rédigée en 1795, qui déclare se « soumettre aux Lois de la République », ou encore un procès-verbal relatant le déroulement de la célébration de la fête dédiée à la Souveraineté du Peuple en 1797.
Les nouvelles lois révolutionnaires entrainent aussi un changement majeur à l’aube du 19e siècle : la mise en place du calendrier républicain au détriment du calendrier grégorien utilisé jusqu’alors. Ce nouveau calendrier impliquait une nouvelle numérotation des années, un découpage différent et de nouveaux noms pour les jours et les mois. Entré en vigueur par un Décret de la Convention Nationale en date du 5 octobre 1793, les révolutionnaires avaient pour ambition, par ce biais, de rompre avec une nomenclature liée à la religion et à la monarchie.
Néanmoins, on peut facilement imaginer la confusion qui régnait dans les administrations françaises durant cette période. Sans compter, les vives résistances qui se sont principalement faites entendre dans les campagnes et mais aussi de la part des élites religieuses. Brumaire, vendémiaire, fructidor, pluviôse… autant de nouveaux termes à retenir et utiliser. Illustration parfaite de ces difficultés, le secrétaire de mairie de Perville semblait un tantinet "se mélanger les pinceaux ". En effet, il a pris soin, sur plusieurs documents, de réécrire les correspondances de dates entre le calendrier républicain et le calendrier grégorien, voire d’écrire simplement la date selon l’ancien calendrier en mentionnant qu’il s’agit du « vieux style ».
Tous ces efforts n’auront finalement pas été utiles très longtemps puisque 12 ans, 2 mois et 27 jours après son instauration, le « calendrier révolutionnaire » est abrogé par le Sénatus-Consulte du 22 fructidor An XIII (9 septembre 1805), malgré les regrets manifestes des rapporteurs : « un jour viendra, sans doute, où l’Europe calmée, rendue à la paix, à ses conceptions utiles, à ses études savantes, sentira le besoin de perfectionner les institutions sociales, de rapprocher les peuples, en leur rendant ces institutions communes ; où elle voudra marquer une ère mémorable par une manière générale et plus parfaite de mesurer le temps. ».
L’intervention à Perville met en lumière la richesse patrimoniale de son fonds d’archives, et rappelle l’importance d’un archivage méthodique pour préserver et valoriser cet héritage au service des générations futures.